EMANOUELA TODOROVA, ARTISTE ET FEMME ENGAGÉE

Bonjour Emanouela, nous sommes ravies de t’accueillir sur le blog de Keep A Breast Europe ! Nous t’avons découvert l’année dernière par le biais d’une vidéo que tu as posté sur ton compte Instagram, puis tu as eu la gentillesse de participer cet été, au moulage de ta poitrine pour en faire un buste qui a été peint et vendu aux enchères pour soutenir notre association ! 

Nous sommes très inspirées par ton combat en tant que féministe et il semblait important pour nous de discuter de ton parcours et combat au quotidien

Serait-il possible de te présenter en quelques phrases ? Emanoula  Podorova, ce nom provient de l'étranger, peux-tu nous raconter ton parcours de vie suite à ton intégration en France ? 

Je m’appelle Emanouela Todorova (il y a deux erreurs dans mon prénom et mon nom dans votre question), née en Bulgarie et arrivée en France en 1991. Mes parents ont quitté la Bulgarie dans le but de fuir le communisme. Nos débuts en France ont été assez rocambolesques (je ne me souviens pas de grand chose car j’avais un an et demi). Avec les bons contacts et beaucoup d’huile de coude, iels ont finalement réussi à trouver un emploi stable dans le Lot, puis dans le sud de la France. Nous sommes resté.e.s là-bas plusieurs années. Ma petite soeur est née et quelques années plus tard, nous nous sommes installé.e.s en Alsace. 

Ce n’était pas la région la plus facile à intégrer en tant que bulgares. J’ai subi beaucoup de racisme, de harcèlement et de misogynie de la primaire au lycée. Ce ne sont pas de très bons souvenirs, mais ça m’a permis de mettre, très jeune, le doigt sur des injustices et des discriminations diverses. 

C’est dans cette région que j’ai passé la plus grande partie de ma vie : primaire, collège, lycée, fac, écoles de commerce, études en alternance, etc. J’ai toujours eu un profil entrepreneurial et créatif. C’est donc sans surprise que j’ai suivi des études de commerce, marketing et événementiel. 

Ce parcours m’a permis d’acquérir rapidement des compétences dans ces différents domaines, et dès l’obtention de mon Master en 2013, j’ai créé mon statut d’auto-entrepreneure. J’ai développé mes client.e.s freelance tout en continuant à travailler dans diverses entreprises. 

Depuis, je trace ma route et j’ai créé l’association DBSP stop au sexisme en mars 2021. Nous luttons chaque jour contre les violences sexistes et sexuelles dans l’espace public au travers de préventions en milieux scolaires, festifs et professionnels. Nous sommes près de 80 adhérent.e.s prêt.e.s à changer le monde ! 

Nous pouvons voir que sur tes réseaux tu t’appelles “ Dis bonjour sale pute”, tu abordes une position tès révolutionnaire pour la cause féministe, pourrais-tu nous en dire plus sur ton combat au quotidien ? 

Comme je le disais précédemment, j’ai créé cette association dans le but de lutter contre les VSS dans l’espace public. Le nom porte lui-même le stigmate de la manière dont beaucoup d’hommes se comportent avec les femmes dans la rue. Nous recevons chaque jour des quantités de témoignages de victimes traumatisées voire brisées.

En tant que présidente, je suis en charge de toute la partie administrative, communication et presse. 

Heureusement, je suis entourée de bénévoles engagé.e.s qui me soutiennent sur les parties : prévention, événementiel, secrétariat, réseaux sociaux, etc. 

Tu le sais, chez keep a breast, nous orientons nos actions sur les enjeux du cancer du sein et de la femme à travers 3 grandes thématiques : Connaissance du corps - Bien-être et santé - Acceptation de soi. Mais nous nous battons aussi pour le women empowerment. Comment penses-tu qu’il y a des similitudes entre les deux causes ?  

Il est essentiel qu’aujourd’hui les femmes puissent se réapproprier l’espace public. Depuis trop longtemps, tout a été pensé par les hommes et pour les hommes. Il est nécessaire que les femmes soient davantage employées dans des postes à haute responsabilité, qu’elles soient parties prenantes dans les décisions concernant l’urbanisme et la mobilité dans l’espace public par exemple, etc. 

Ces changements impacteraient massivement les thématiques que vous abordez car les femmes se sentiraient plus libres dans l’espace public. Plus libres d’être elles-mêmes, plus libres de se déplacer en sécurité, plus libres de s’habiller comme elles le souhaitent, etc. Leur niveau de confiance en elles n’en serait que plus puissant et fédérateur. 

Nous avons moulé ton buste chez Keep A Breast, en tant que passionnée de peinture, nous savons que c’est toi qui vas le peindre, pourrait -tu nous dire ce que tu imagines pour ce buste au vu de tes engagements ? 

Je n’ai pas encore imaginé ce que je pourrais faire. Je pense que je vais attendre de l’avoir entre les mains pour laisser mon imagination faire son boulot. Je pense à quelque chose de coloré... on verra ! 

Nous avons pu voir que tu avais écrit un livre sur le combat que tu mènes pourrais-tu nous parler rapidement des motivations qui t’ont poussé à le rédiger ? 

L’idée du livre était de pouvoir donner des clés pour lutter contre le harcèlement dans l’espace public. Je l’ai volontairement rédigé dans un français abordable afin qu’il puisse être mis à disposition dans des collèges, des lycées, des centres socio culturels, des foyers et auprès de public apprenant la langue française. 

Sachant que tout le monde ne peut pas forcément se l’offrir, j’ai créé un podcast disponible sur toutes les plateformes (DBSP) qui retrace ce qui a déjà été dit dans le livre. Mon objectif est que toute notre sensibilisation circule auprès du plus grand nombre afin que l’on puisse déposer des graines de réflexion un peu partout. 

Lors de tes interventions dans les lycées, qu'est-ce que tu aimerais faire passer comme message auprès de toutes les femmes ? 

Nous nous adressons en général à l’ensemble de la classe sans faire de distinction de genre. Nous parlons par ailleurs de femmes et de personnes sexisées pour ne mettre personne à l’écart. Pour autant, nous souhaitons encourager les potentielles victimes à libérer leur parole, à témoigner si elles sont prêtes, à cherche une aide extérieure (thérapeutique ou juridique). 

Nous souhaitons aussi encourager les garçons à réagir, à ne pas rester spectateur, à ne pas être complice de ce que peuvent faire leurs camardes. Il est essentiel que l’ensemble de la société s’arme ensemble contre le fléau des VSS. 

J’imagine qu’en tant que féministe, tu dois avoir plein de ciations, de mantra qui te guide, y en a-t-il un que tu voudrais nous partager ? 

« On se lève et on se casse. » Adèle Haenel 


Emanouela, nous te remercions d’avoir répondu à nos questions et d’avoir partagé ton histoire avec la communauté de Keep A Breast et les lectrices.


XOXO Keep A Breast

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