Créative et inspirante, l'interview de Fanny Miosotis

Hello Fanny ! C’est un réel plaisir de pouvoir te poser quelques questions aujourd’hui. La façon dont tu abordes ta maladie est très courageuse et admirable ! Il était évident pour nous de vouloir discuter avec toi pour aider toutes les femmes à mieux vivre les obstacles du quotidien.

 
 

En premier temps, serait-il possible de nous raconter brièvement ton parcours avec le cancer ? Comment l’as-tu découvert et quelles ont été tes premières réactions ?

J’ai reçu la nouvelle de mon cancer le 7 juin 2021 (date que je n’oublierai probablement jamais). Quelques semaines avant, mon chéri et moi avons senti, complètement par hasard, une masse volumineuse et dure au niveau de mon sein gauche. 

La semaine suivante, j’étais chez ma gynéco qui m’a prescrit mammographie et échographie, en ajoutant sans aucune inquiétude « si jamais on vous propose une biopsie, ne vous en faites pas, c’est le protocole ». 

Dès ce moment-là, j’ai compris qu’il fallait que je me prépare à toute éventualité. Sans panique aucune, mais voilà: je ne voulais pas nier le fait que, peut-être, cette masse n’était pas bénigne. 

J’ai fait les examens demandés avec calme et observation. J’ai senti très vite en voyant le visage du médecin que ce qu’elle voyait à l’écran de l’échographie était inquiétant. Elle m’a effectivement dit qu’il fallait faire une biopsie rapidement, mais il était prévu que je parte en Grèce le lendemain de l’échographie pour quelques jours de vacances.

Je n’ai pas voulu tout décaler. Je comprenais l’enjeu, mais je ne voulais pas que ça entrave mes projets et encore une fois, je restais sereine sans pour autant être dans le déni.

 Au retour de nos vacances, pendant lesquelles mon chéri m’a demandée en mariage en me précisant que « quoiqu’il arrive, il serait là », c’est parti: biopsie, et quelques jours plus tard, annonce. 

« C’est bien un p’tit cancer » me dit ma gynéco. Et pas si petit que ça vu qu’il faisait déjà 4,7 cm ! Malgré ma préparation, entendre ces mots est surréaliste et la claque se fait bien sentir. Je m’étais déjà effondrée au travail, après un appel de la secrétaire disant que ma gynéco voulait me voir (j’ai tout de suite compris). Là, je n’étais pas effondrée, mais les larmes coulaient tout doucement alors que j’écoutais, ma main tenant très fort celle de mon futur mari.

Je suis sortie de là bizarrement sereine. J’ai de nouveau pleuré un bon coup, mais ensuite j’ai SU: ce cancer n’était pas là pour rien. J’ai tendance à croire que tout arrive pour une raison. Non, ce n’était pas injuste et ma vie n’était pas gâchée: c’était pour moi un coup de pied au cul pour vivre encore mieux. Après une année compliquée, certes, mais que j’allais affronter en étant la plus digne et positive possible.

 

Actuellement, tu vis ta maladie avec légèreté et une touche d’humour. Pourrais-tu nous expliquer la manière de voir ta nouvelle vie avec ce fameux Gilbert ?

C’est vrai que l’arrivée de mon cancer, Gilbert, a chamboulé ma vie. Je ne la qualifierai pas de « nouvelle vie » mais d’une vie mise sur pause. Ou même carrément: une vie remise à zéro en appuyant sur le bouton RESET.

Les séquelles laissées par les traitements ainsi que le traumatisme même d’avoir une maladie mortelle sont très lourdes à porter. Le plus souvent, j’ai réussi malgré tout à en apprécier les bénéfices. Car il y en a! 

Déjà réaliser qu’il faut vraiment VIVRE et chérir sa santé en en prenant le plus soin possible. Se chérir soi et arrêter de se gâcher la vie avec cette obsession de vouloir gommer le moindre petit défaut physique. 

Gagner en bienveillance à mon égard. 

Découvrir une nouvelle facette de moi, si forte, dont je ne soupçonnais même pas la présence! 

Un rapport encore plus fort et authentique avec certains proches, mon fiancé en première place.

Les rencontres magnifiques que j’ai pu faire et les moments d’émotions exacerbées que j’ai vécus.

Cette vie avec Gilbert m’a beaucoup apporté, et m’apporte toujours.

A côté de cela, il y a de nombreux points négatifs qui ne peuvent pas être niés - souffrances physiques et psychologiques, lacunes cognitives, une vie de couple mise à très rude épreuve, des épisodes de colère noire, un sentiment d’injustice de temps à autres, une vie future challengée etc….- mais même si je m’accorde le droit d’avoir des moments de tristesse et de colère (car ils sont nécessaires), j’essaie toujours de me dire que tout est une question de patience et de résilience.

Je suis convaincue à 100% de l’énorme pouvoir du mental sur le physique.

Donc rester sereine sur l’avenir, subir les souffrances avec patience et me dire que demain est un autre jour, qu’après la tempête je serai extrêmement grande et fière du chemin parcouru… voilà comment j’ai abordé la vie avec ce Bébert.

 

Comme nous le voyons sur ton compte Instagram, après ta chimiothérapie, tu es devenue une nouvelle personne. Tu as pu exprimer ta créativité d’une autre façon dans ton métier de makeup artist. Comment as-tu eu l’idée de réaliser ces œuvres sur ton crâne ? Qu’est-ce que cela représente pour toi ?

Lorsqu’on m’a expliqué mon programme de chimiothérapie et affirmé que j’allais bel et bien perdre mes cheveux, j’ai eu le même réflexe que celui d’avant diagnostic: je voulais m’y préparer, tout en étant curieuse de chaque étape.

J’ai fait le choix de ne pas me raser les cheveux avant la chimio par exemple, car je VOULAIS comprendre les émotions liées à la première touffe de cheveux qu’il me resterait dans la main.

J’avais donc fait un pacte avec moi-même: me raser la tête jute après cette première chute.

Avant que ce moment n’arrive je me suis dit… « tu vas devenir chauve et découvrir une partie de toi que tu ne connaissais pas… Il faut que tu te fasses maquiller! ».

L’idée a donc germé très tôt, d’abord comme un kiffe que je voulais m’offrir: moi qui ai passé des années à faire du maquillage artistique, à peindre des corps etc… je voulais exploiter ce futur crâne nu de la même façon, et ME donner et donner aux autres une image alternative du cancer.

Le projet a grossi au point de demander à 9 makeup artists et collègues (qui ont tous fait partie de mon parcours de vie) de sublimer mon crâne d’oeuf de manière complètement libre. J’étais la 10ème makeup Artist à le faire, car je tenais à me faire une auto-création pour la dernière session.

Au fil de sa réalisation, mon projet a pris plus d’ampleur symbolique de par l’évolution de mon propre parcours de soin -et donc de mes émotions-, mais aussi des rencontres de K-sisters que j’ai pu faire via les réseaux, ou lors d’évènements particuliers.

Il est devenu clair que ce projet était destiné à grandir et à être déployé sur les crânes d’autres femmes, à la fois pour développer la prévention en accrochant le regard, mais aussi pour montrer une autre image du cancer et affirmer que, même crâne nu, la beauté et la féminité sont présentes et même souvent, révélées.

 

La prévention contre le cancer devient (d’une façon évidente) importante pour chaque femme touchée par cette maladie. Comment l’abordes-tu dans ta vie quotidienne ? Est-ce facile pour toi d’en parler autour de toi et dans des associations ?

Le projet MAQUILLE MON KRÂNE est mon principal canal de communication pour faire de la prévention. Mon souhait futur est de le développer dans ce sens.

Au quotidien, j’en parle très librement à mon entourage et sur mon compte Instagram oui! J’estime que le cancer est un sujet encore très tabou dans notre société, qu’il est systématiquement associé à la mort et mis de côté presque pour éviter « d’effrayer ».

Je souhaitais en montrer une autre image: ne pas minimiser bien sûr la difficulté des traitements et la gravité de cette maladie, mais aussi prouver que l’on peut la vivre autrement que dans l’ombre et dans la tristesse. 

En parler ainsi sur les réseaux me permet donc à la fois d’inspirer d’autres malades en difficulté, d’informer les autres sur le sujet, et de sensibiliser à la prévention contre le cancer du sein à tout âge.

 

As-tu de nouveaux projets qui arrivent ? Certaines envies ? D’autant plus que nous avons appris que Bébert t’as largué ! 

Oui Bébert m’a bel et bien larguée! Actuellement e gros « Gilbert » a dégagé vu que l’opération d’extraction (aka tumorectomie + curage axillaire) s’est très bien passée!

Mais pour le moment, mon projet principal reste de me finir mes traitements, puis de me reconstruire.

Car on parle beaucoup du « pendant cancer », mais l’après-cancer est un nouveau palier à passer, bien difficile aussi! (Que je n’ai pas encore atteint car il me reste les niveaux radiothérapie puis thérapie ciblée à valider!).

Le projet global est donc de me reconstruire sur CHAQUE aspect de ma vie: ma vie professionnelle, sociale, ma vie de couple et une redécouverte de mon intimité, l’apprivoisement d’une nouvelle image de soi, de nouvelles émotions etc…

En parallèle, bien sûr: MAQUILLE MON KRÂNE. J’aimerais développer mon concept en grand, embarquer plusieurs maquilleurs et photographes avec moi afin de répondre à des demandes partout en France, proposer le concept aux hôpitaux et aux associations etc…

Il y a donc beaucoup à faire!

Et j’ai envie plus que jamais de cocher peu à peu chaque case de ma Bucket List (ma liste de rêves, petits ou grands, à réaliser dans ma vie).

 

Pour terminer, aurais-tu un conseil ou une phrase à dire à nos lecteurs.rices qui traversent un passage compliqué comme celui que tu as vécu ?

Que la vie nous impose certaines épreuves pour une raison. Quelle qu’en soit la difficulté et les souffrances qui en découlent, on a l’opportunité d’en tirer quelque chose de beau et de significatif.

A nous de faire le choix de saisir cette opportunité!

 

Merci énormément d’avoir répondu à nos questions. Ta spiritualité et ton épanouissement grandissant de jour en jour est hyper réconfortant.

Si vous voulez en apprendre davantage sur Fanny, découvrir ses sublimes créations et sa vie au quotidien ; vous pouvez la suivre sur son compte Instagram principal  ou sur son compte de makeup.



Prenez-soin de vous !

XOXO Keep A Breast 

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